Un Fribourgeois découvre une nouvelle espèce d'ichtyosaure

Un doctorant fribourgeois de 26 ans a identifié une nouvelle espèce de reptile marin vieille de 180 millions d'années.

Eurhinosaurus mistelgauensis sur un "champ de bataille" de bélemnites. © Urwelt-Museum Oberfranken / Andrey Atuchin

À 26 ans, Gaël Spicher, un doctorant originaire de Fribourg, vient d'inscrire son nom dans les annales de la paléontologie. En analysant des fossiles bavarois dans le cadre de son travail de master à l'Université de Bonn en Allemagne, il a identifié et décrit une toute nouvelle espèce d'ichtyosaure. Baptisé Eurhinosaurus mistelgauensis, ce reptile marin est vieux de 180 millions d'années. L'étude dirigée par Gaël Spicher, associé à des collègues allemands et hollandais, a été publiée dans le journal scientifique Fossil Record.

Les restes remarquablement conservés de l'animal dormaient dans les collections d'un musée allemand. L'espèce a été découverte dans une carrière de Mistelgau, au nord de la Bavière. Carrière qui lui a d'ailleurs donné son nom, afin de mettre en avant le site. "On y a retrouvé ces 20 dernières années de nombreux fossiles très bien préservés", raconte le jeune scientifique, actuellement doctorant à l'Université de Fribourg et au JURASSICA Museum de Porrentruy.

Contrairement à de nombreux spécimens européens, souvent aplatis par la pression des sédiments, ceux de Mistelgau étaient conservés en trois dimensions, une aubaine pour les paléontologues. "Bien que désarticulé, il était très beau", détaille le doctorant. Identifier une nouvelle espèce est le fruit d'un travail méticuleux. "La première étape est assez basique. On va observer le fossile à mains nues, avec des loupes et faire des photos. On va regarder ce qu'on voit, ce qu'on reconnaît, et on va essayer de le comparer avec toutes les espèces déjà décrites."

Reconstruction des fossiles d'Eurhinosaurus mistelgauensis. Source: Gaël Spicher.

Un "dauphin-reptile" à l'allure d'espadon

Le museau très allongé de la créature, bien plus long que sa mâchoire inférieure, a permis rapidement d'identifier le genre Eurhinosaurus. Mais ce n'est que tardivement qu'une "compilation de différences" avec les espèces déjà connues, comme des côtes plus robustes par exemple, a mis la puce à l'oreille des chercheurs.

Mais à quoi ressemblait donc cette créature qui peuplait les mers qui recouvraient alors une grande partie de l'Europe? "Il faut s'imaginer un peu un dauphin, bien que ce ne soit pas un mammifère, avec une nageoire de la queue verticale et non horizontale", décrit Gaël Spicher. "C'est un reptile complètement éteint qui vivait au Mésozoïque durant la période des dinosaures." Son rostre très allongé lui donne une vague ressemblance avec un espadon moderne.

Scanner les os pour trouver des pathologies

Les recherches sur Eurhinosaurus mistelgauensis ne devraient cependant pas s'arrêter là, dévoile Gaël Spicher. Si l'équipe de scientifiques en a les moyens, elle aimerait pouvoir faire des analyses supplémentaires, notamment parce qu'elle a observé des pathologies potentielles sur les fossiles. "On aimerait bien, à l'avenir, scanner certaines parties du squelette pour voir l'intérieur de l'os. Un peu comme une IRM, comme on le fait pour les humains."

L'étude de ces écosystèmes anciens permet de documenter les mécanismes de disparition et de réapparition des espèces. Des modèles précieux pour la biologie de la conservation moderne. "On est actuellement face à une crise de biodiversité et on sait aussi qu'à l'époque, il y a eu des crises similaires, pas causées par l'homme, mais naturellement", explique le jeune scientifique. "Comprendre ces changements, c'est aussi nous aider à comprendre les mécanismes d'aujourd'hui."

Frapp - Mattia Pillonel
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