LNM: "Une partie du personnel est épuisée"
Entre difficultés financières et malaise du personnel, la Société de navigation des Trois-Lacs cherche un nouveau cap. Interview du président du conseil d’administration.
La Société de navigation des lacs de Neuchâtel et de Morat est sous le feu des projecteurs depuis une semaine. Outre les accusations de gestion autoritaire révélées par une enquête de la RTS et d’Arc Info, qui pèsent sur son directeur, la situation financière de la LNM inquiète.
La Télé: Nicolas Gigandet, vous êtes le président du conseil d’administration de la LNM. Lundi, vous avez annoncé le lancement d’une analyse externe demandée par les cantons de Neuchâtel, Fribourg et Vaud. Les résultats devraient tomber d’ici début 2026. Qu’attendez-vous de cette enquête?
Nicolas Gigandet: Je pense qu’il est important d’avoir un regard externe sur la situation. Elle doit permettre d’obtenir une analyse objective, neutre et transparente, et nous aider à prendre les bonnes décisions pour l’avenir de la société.
Cette analyse va se pencher sur deux axes en particulier: la gouvernance d’un côté, puis le modèle d’entreprise de l’autre. Il s’agit notamment de faire la lumière sur le management, la direction de la société visée — qui rejette d’ailleurs ces accusations, tout comme son conseil d’administration.
Le conseil d’administration a finalement reçu des points de vue divergents du personnel concernant le management du directeur. Je pense que l’analyse externe doit permettre de rétablir les faits afin d’être pleinement au clair sur cette situation.
Vous évoquez effectivement différents points de vue de la part du personnel. Le syndicat de la LNM appuie cette analyse externe. Il semble donc y avoir une véritable souffrance au travail.
Ce n’est pas une situation que nous renions. Elle est compliquée, probablement en raison du contexte financier et médiatique. Je suis absolument du même avis que le syndicat: il faut appuyer cette analyse externe. Et, au passage, je tiens à remercier sincèrement les collaborateurs de la LNM de tenir la compagnie à bout de bras dans cette situation très difficile, saison après saison. J’espère vraiment que cette période actuelle nous permettra de retrouver davantage de sérénité pour l’avenir.
Encore un mot sur les collaborateurs. Avez-vous une idée de l’état dans lequel ils se trouvent actuellement?
Oui, je pense qu’aujourd’hui, une partie du personnel est épuisée, car saison après saison, il faut tenir la baraque et maintenir les bateaux en état avec des moyens limités. Et c’est précisément grâce à ce personnel que, jusqu’à présent, la société a pu continuer à naviguer.
Vous parlez de bateaux usés. En effet, vous avez mené au sein de la LNM une étude sur leur état. De gros travaux seront nécessaires. Vous demandez davantage de soutien de la part des cantons, qui apportent actuellement 1,8 million de francs annuels. En cas de réponse négative, la survie de la LNM serait-elle menacée?
On peut craindre, dans ce cas, que plusieurs bateaux ne puissent pas naviguer la saison prochaine. Dans le pire des scénarios, c’est toute l’exploitation qui serait menacée. Nous sommes confrontés à une situation où les moyens consacrés à l’entretien ces dernières années ont probablement été insuffisants. Malheureusement, cette situation nous rattrape aujourd’hui.
Pourtant, le problème n’est pas nouveau. Lors du précédent exercice, vous aviez déjà enregistré une perte de 770'000 francs. Peut-on dire que le conseil d’administration n’a pas vraiment fait son travail?
Je dirais que la première alerte est effectivement venue l’année dernière, avec ce manque d’entretien qui s’est fait ressentir. Durant les exercices précédents, la situation financière n’était pas décrite comme telle. Mais, malgré tout, le déficit d’entretien était réel. Probablement, les investissements ont manqué, et ces manques ne se reflètent pas immédiatement dans le compte de résultat. C’est plutôt en termes de situation bilan qu’il faut s’interroger pour l'avenir.
Là, actuellement, LNM est une compagnie de transport. Est-ce qu'il ne faut pas revoir ce modèle et penser plutôt à la LNM comme une société de tourisme?
La LNM reste financée par le mécanisme des subventions liées au transport. Mais, dans les faits, elle constitue un instrument de la politique touristique de la région des Trois-Lacs — voire l’un de ses acteurs majeurs. Comme toutes les autres compagnies de navigation en Suisse, elle a besoin du soutien des pouvoirs publics. Je pense qu’un modèle plus clairement orienté vers le tourisme, accompagné de toutes les réflexions que cela implique, pourrait effectivement être une piste intéressante.



