"Je me voyais mal faire un album sans parler d'écologie"

Grand Corps Malade nous a parlé de son dernier album “Reflets” et de son prochain biopic “Monsieur Aznavour”. Interview.

Grand Corps Malade se produira à la BCF Arena en mai. © KEYSTONE

RadioFr: C'est Mosimann, qu'on connaît bien en Suisse, qui est derrière les sons de ton dernier album “Reflets”, un album qui à la base aurait dû s'appeler “Portraits”. “Reflets”, parce que tu aimes ce mot, parce que tu le trouves poétique. Et parce que cet album est finalement un reflet sur les gens qui t'entourent, sur ton public, sur la société, sur toi aussi. On parle d'amour, du monde d'aujourd'hui, du monde de demain, du temps qui passe et même de l'écologie. L'écologie, les enjeux climatiques, c'était une évidence, voire même un devoir d'aborder tout ça quand tu l'as fait en 2023?

Grand Corps Malade: Devoir, je ne sais pas. Moi, je ne m'impose rien. En tout cas, c'était une évidence, c'était naturel pour moi. L'album s'appelle “Reflets”. En effet, dans tout ce que tu dis, c'est exactement ça. Mais il y a notamment les reflets de notre époque, les reflets du monde. Et je me voyais mal, en 2023, faire un album sur les reflets de notre époque sans aborder cet enjeu écologique. C'est évidemment un sujet qui m'intéresse, qui me préoccupe, comme beaucoup de plus en plus. Heureusement, on en parle de plus en plus, il serait temps. Du coup, j'avais envie d'écrire là-dessus.

Tu as poussé le vice même jusqu'à la pochette du vinyle, du vinyle en lui-même, où tout est fait de matière recyclable?

Oui, on a un métier où ce n'est pas tout le temps facile d'être, comme on dit, éco-responsable. Par exemple, là, on est sur la route avec des tourbus, avec des camions remplis de matériel. Si on veut faire une grosse tournée de zéniths, il n'y a pas encore d'alternative à ça, à avoir des gros poids lourds sur la route. Donc, au moins, quand on peut se permettre d'être éco-responsable, on l'est. Et en effet, tous les CD, tous les vinyles et toutes les pochettes CD et vinyles sont en matières recyclables.

Et il y a justement ce titre “2083”, une chanson poignante, une chanson qui interpelle, qui fait réfléchir. C'est ton petit-fils qui t'écrit 60 ans plus tard sur l'état de la planète, qui n'est évidemment pas très rassurant. Et le message, en gros, est que si on ne se bouge pas, on va effectivement retrouver la guerre partout, on va avoir 60 degrés au Caire, on va avoir New-York sous l'eau. Et tout ce que tu racontes dans cette chanson, tu ne l'as pas inventé. Au contraire, tu t'es pas mal renseigné avant de poser ces mots sur ce titre?

Oui, bien sûr. Le but, là, c'était de faire un travail presque un peu journalistique. C'est-à-dire qu'il ne s'agissait pas de raconter tout et n'importe quoi pour inquiéter les gens pour rien. Et malheureusement, tout ce que je dis là, c'est vraiment un scénario possible. Et oui, je me suis renseigné, j'ai vu des spécialistes, j'ai lu les rapports du GIEC, etc., qui sont quand même figures d'autorité en matière d'écologie et de science. Et donc du coup, voilà, j'ai malheureusement rien inventé de ce scénario qui pourrait être vraiment le scénario catastrophe absolu.

Il y a des titres un peu plus légers dans cet album Reflets, dont “Retiens les rêves”, qui a d'ailleurs lancé ce dernier album. C'est la musique de Vincha, rappeur et chanteur français, qui t'a inspiré ce texte. Un texte très tendre pour tes deux garçons de 10 et 13 ans. Un titre encore très personnel mais qui évidemment s'adresse aussi à tous parents. Tu évoques ces petits moments du quotidien qui peuvent être banals, mais on doit les chérir ces moments parce que le temps passe vite?

Vous avez tout dit. C'est en effet ces moments absolument classiques. Tu te rends compte qu'ils ne sont pas éternels. Donc ces petits moments-là, il faut savoir faire un pas de côté, prendre un peu de recul pour en profiter, pour les vivre intensément. Parce qu'on le dit souvent, une fois qu'on a des enfants, le temps s'accélère, le sablier s'accélère. Et c'est vrai que c'est le cas. J'ai l'impression qu'ils sont arrivés hier et là, ils ont déjà 10 et 13 ans, donc ça passe vite.

Il y a aussi ce biopic sur Aznavour que tu es en train de terminer, « Monsieur Aznavour » qui sortira le 23 octobre prochain. Est-ce que c’est un projet que Charles Aznavour t’a validé de son vivant ?

Oui, c'est un projet dont on parlait avec lui et qu’il nous avait validé. Quand je dis « nous », c'est moi et Mehdi Edir, avec qui j'ai fait aussi mes deux premiers films. Il avait validé le fait que ce soit nous qui le réalisions, que ce soit Jean Rachid, son gendre, qui le produise. Et du coup, il est décédé, Charles, en 2018, au moment où on allait se mettre au projet. Donc évidemment, on ne l'a pas fait à ce moment-là. On a laissé passer quelques années. Mais fort de l'idée qu'il nous avait validée, quelques années plus tard, on avait envie de le faire. La famille aussi. Donc on s'est remis au boulot.

Et du boulot il y en a eu, j'imagine?

Oui! Entre l'écriture du scénario, la préparation du film. C'est un film d'époque où on s'intéresse à l'avant-succès, donc à toute la jeunesse de Charles Aznavour. On passe par la Deuxième Guerre mondiale. Donc voilà, c'est un film d'époque aussi, avec des décors et des costumes incroyables. Donc c'était un gros boulot. Et ça y est, on arrive dans la dernière ligne droite.

C'est Tahar Rahim qui a eu le rôle. Tu en parles vraiment en bien! C'était une évidence pour toi qu'il interprète Charles Aznavour?

Quand on nous a sifflé son nom, c'est notre directeur de casting qui a pensé à lui, avant même qu'on commence vraiment le casting, on s'est dit, oui bien sûr. Bien sûr, physiquement, il n'y avait pas forcément une ressemblance flagrante. Après, c'est vrai que Charles Aznavour, dans sa jeunesse, était très brun, très méditerranéen. Donc il y avait quelques similitudes avec Tahar Rahim. Mais c'est surtout son talent. On savait qu'il pouvait complètement incarner un personnage. Il fait partie de ces acteurs assez uniques qui peuvent rentrer dans le rôle à 100%. Et là, il a fait un travail incroyable pour parler comme Charles Aznavour, pour chanter comme Charles Aznavour, pour bouger comme Charles. Il a fait une performance incroyable.

Ecouter l'interview complet de Grand Corps Malade:

RadioFr. - Virginie Pellet / an
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